Employer pour former, enseigner pour apprendre

Introduction

En écrivant cet article en juxtaposant deux propositions dont la première est “employer pour former“, je prends le risque de sortir de mon cercle de compétence, au sens où l’entend Warren Buffet. Dans l’article “Formateurs sortez de votre zone de confort” je définis ce que qu’est le cercle de compétence et en quoi il est dangereux d’en sortir.
Néanmoins je prend le risque – sachant qu’en faisant la deuxième proposition “enseigner pour apprendre” je me situe au centre exact de mon cercle et, par ailleurs, je pense que le moment est venu de partager de très anciennes idées et des convictions fortes. L’actualité politique l’autorise aussi.

A l’articulation des deux propositions (en leur point commun) on trouve l’apprentissage.

Enseigner pour apprendre

Icone e-learning Emathos formation à distance

J’ai enseigné longtemps, et, aujourd’hui, je continue d’apprendre, chaque jour, pour enseigner, former, concevoir.

Si l’on observe la phrase “apprendre pour enseigner” dans un miroir, l’on voit presque le reflet suivant:
Apprendre pour enseigner / enseigner pour apprendre
Dans le premier cas “Enseigner” est le but, et “Apprendre” le moyen. Dans le second c’est l’inverse: Apprendre est le but (quelle que soit la raison ultime de l’apprentissage) et enseigner le moyen.
Question 1: pourquoi retrouve-t-on d’anciens “bons” élèves parmi les enseignants? Et quel était leur but en embrassant la carrière?
Question 2: que se passerait-il, ou pourrait-il se passer si l’on recrutait les futurs enseignants exclusivement parmi les anciens “mauvais” élèves?

Juste pour vous faire cogiter, un peu, en passant 😉

Dans un autre article, nous avons vu l’efficacité de l’apprentissage par problème , une méthode pédagogique qui a  fait ses preuves.

Mais mon propos est ailleurs, dans la suite de cet article je me propose de démontrer qu’enseigner pour apprendre est une excellente stratégie globale.

Le tuteur du futur?

Tutorat – source image pexels-photo-292627

Prenons un exemple concret susceptible de vous parler:
Supposons que vous ayez au sein de votre entreprise une fonction qui vous amène à accueillir des stagiaires ou des apprentis. On vous confie régulièrement un rôle de tuteur ou de tutrice.
Aujourd’hui, vous avez le choix de vous porter volontaire pour l’une des trois missions suivantes:

1. Animer (pour les apprentis/stagiaires) 6 atelier de deux heures d’approfondissement des connaissances sur le logiciel word
2. ou la même chose sur excel
3. ou, enfin, animer 12 ateliers d’une heure de remédiation en orthographe / grammaire

Trois questions maintenant:
1. Pour quelle mission vous déclarez-vous volontaire?
2. Comment allez-vous vous préparer à remplir cette mission?
3. Quels bénéfices personnels allez-vous tirer de la préparation et de la mise en oeuvre des ateliers?
Je vous apporte quelques éclairages méthodologiques:

Pour remplir votre mission, allez devoir vous poser toutes les questions essentielles dans une ingénierie pédagogique:

  • Qu’est-ce que l’apprenant devra savoir ou savoir-faire à l’issue des ateliers et de chaque atelier spécifique?
  • Comment vais-je vérifier qu’il ou qu’elle sait ou sait faire?
  • Quelles activités d’apprentissage, adaptées, vais-je lui proposer?
  • Quelle(s) aide(s) vais-je lui proposer pour le soutenir dans ses apprentissages?
  • Qu’ai-je, moi-même, besoin d’apprendre pour mener cette mission à bien.

Votre manager qui est astucieux (astucieuse) sait très bien que le premier bénéficiaire de toute ingénierie pédagogique est l’ingénieur pédagogique ou le formateur lui-même.
Quoi? Ne me dites pas que vous avez des difficultés avec l’orthographe.

Employer pour former

Un lieu d'apprentissage - une bibliothèque

Bibliothèque de la ville de Kirchheim/Teck

La première monture de cette section, écrite à la bibliothèque de Kirchheim/Teck, faisait 10 pages et était très détaillée sur tous les plans, et l’idée se perdait en route.
La voici exprimée en peu de mots :
Les jeunes ont du mal à entrer dans l’emploi et les anciens ont du mal à y rester.

Créons des structures ad hoc qui cibleraient les jeunes et les anciens et leur donneraient un statut, une couverture sociale et seraient en mesure d’intervenir sur le marché.

Il y a longtemps, au moment ou le chômage commençait à peine à percer, je me souviens d’une BD de Gébé: L’An 1.
Dans une planche, Gébé nous proposait, pour régler le problème du chômage, d’adopter un chômeur (je n’ai malheureusement pas retrouvé la planche).

Dans un article du CEREQ [1],  je lisais récemment:
“Le recours à la formation lors des recrutements reste marqué du sceau de l’inégalité de traitement. Il est plus systématique pour les salariés à temps plein et pour ceux qui auparavant étaient déjà en emploi. Lorsque l’on est un ancien chômeur, la probabilité de bénéficier d’une formation à l’embauche est réduite. Et pourtant, sans que l’on puisse déterminer le sens de la causalité, il y a bien pour les chômeurs un lien entre le fait de bénéficier d’une action de formation à l’embauche et la possibilité qu’ils ont à se stabiliser dans l’emploi.”

Mon idée est la suivante:

Sachant que même les étudiants doivent travailler pour financer leurs études et que les apprentis sont dans une relation contractuelle avec l’entreprise qui les accueillent, pourquoi ne pas proposer, à partir de la fin de la scolarité obligatoire, de faire entrer les jeunes (sur la base du volontariat) dans une structure de type entreprise – coopérative – association (je laisserai ici aux juristes le soin de faire des propositions, sinon la sortie du cercle de compétence est assurée) – structure qui  leur assurerait une couverture sociale et serait apte à proposer ses services sur le marché.

Pourquoi est-ce pertinent pour les jeunes?

Les jeunes qui selon le statut et/ou leur avancement dans les études pourraient travailler 5/ 10/ 20 heures par semaines, ou à temps plein pour le compte de la société, bénéficieraient:

1. d’une couverture sociale indépendante de celle de leurs parents;
2. d’un soutien (mutuel) dans le cadre d’une communauté d’appartenance – sans nécessairement y produire les mêmes prestations (l’apprenti boulanger sera détaché dans une boulangerie; le bac + 5 en sciences des données le sera dans une banque si elles existent encore);
3. d’une puissance “marketing” liée à la visibilité de la communauté dans l’espace médiatique, local, régional, national, mondial – selon les orientations de la dite communauté;
4. d’une infrastructure pour l’apprentissage tout au long de la vie ;
5. voire, si la communauté le décide et l’organise, d’un logement (individuel ou collectif)
6. d’un compte bancaire auprès d’une banque citoyenne (suivez mon regard), compte sur lequel pourraient être versés, automatiquement, aides, bourses, subventions et rémunérations);
7. d’un sponsoring d’entreprises ou de particuliers, …

Et les Seniors, dans tout cela?
C’est simple, au lieu de les envoyer au chômage, en pré-retraite, ou au placard, ils pourraient, à leur initiative, intégrer une telle communauté, proposer leurs services et compétences au marché, et, si ils le souhaitent et en ont les compétences, assurer une fonction de tuteur ou mentor auprès des jeunes.

Et je m’arrête là. Dans mon esprit, la communauté pourrait regrouper de 50 à 150 personnes
Et si vous voulez savoir pourquoi, n’hésitez pas à me contacter.

Conclusion

Pour apprendre tout au long de la vie, on peut y aller seul – et on ira peut-être parfois plus vite – mais on ira plus loin à plusieurs. L’homme préhistorique vivait en communautés de 30 à 50 personnes, sa survie dépendait de son appartenance à cette communauté. Demain, notre capacité de vie et d’adaptation au changement sera liée à notre capacité d’apprendre, au sein de communautés de vie (et aussi de pratique).

Enfin, Gandhi ne disait-il pas: “Vivez comme si vous deviez mourir demain. Apprenez comme si vous deviez vivre éternellement” (“Live as if you were to die tomorrow. Learn as if you were to live forever.”[2]

Sources

[1] Article du CEREQ

[2] citation(s) de Gandhi

 

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