Learning Coach: Le précepteur du 21e siècle? 7/n

Compétence  communication

Introduction

Dans la suite logique du billet 5/n qui présentait les référentiels et du billet suivant consacré à la pensée critique, ce billet s’intéresse à la compétence « communication »

Vaste sujet, me direz-vous, et je ne dispose pas du temps pour écrire la n-ième thèse de doctorat sur le sujet. J’ai fait une rapide  recherche internet, beaucoup lu, et retenu quelques extraits d’un document qui traite de l’apprentissage de la communication en milieu scolaire (1).

Dans la première partie de ce billet, je vais restituer sans commentaires mais avec des intertitres ce que j’ai noté en passant, et, dans la deuxième partie, comme toujours dans cette série, je vais dessiner le rôle que pourrait jouer un Learning Coach, dans les situations d’apprentissage de la communication, dans différents contextes scolaires.

Extraits du document sur l’apprentissage de la communication en milieu scolaire (1)

Définition 1

Apprentissage de la communication ” sera entendu comme désignant la transmission de savoirs et de savoir-faire relatifs aux activités communicatives, à l’oral, dans leurs dimensions verbales et non verbales, et à l’écrit, et leur appropriation par des élèves-apprenants. Les situations scolaires considérées peuvent être diverses : moments consacrés à l’apprentissage de la langue maternelle ou d’une langue étrangère, mais aussi autres activités en milieu scolaire (autres activités académiques ou échanges informels). Elles impliquent également des partenaires multiples : enseignants et autres adultes de l’école, élèves d’âge divers.
(…)

Définition 2

La communication verbale et non verbale à l’École, c’est l’ensemble des échanges oraux, mimogestuels, proxémiques et kinésiques qui se déroulent en classe et hors de la classe dans
l’institution scolaire.

Compréhension des mots et gestes d’accompagnement.

Bates, Dale & Thal (1995) ont montré que la compréhension de mots s’accompagne de l’imitation denouveaux gestes. De même, la production des premiers mots s’accompagne de gestes de désignation, de gestes conventionnels (bravo, au revoir, etc.), de gestes symboliques (faire semblant de boire, de téléphoner, etc.). Pour certains auteurs (Morford & Goldin-Meadow, 1992 ; Capirci et al., 1996), les gestes constituent un mécanisme de transition dans l’accès au langage : les gestes sont d’abord produits seuls, puis accompagnés de mots. Comme pour le lexique, la compréhension des gestes précèderait la production : les enfants peuvent comprendre des combinaisons de gestes et de mots sans pouvoir les produire. La fréquence des gestes déclinerait lorsque l’enfant parvient à combiner des mots. Guidetti (1998, 2001) montre au contraire que le répertoire des gestes conventionnels est large et s’accroît avec l’âge : ils constituent une modalité de communication relativement indépendante du langage, et non pas une modalité transitoire avant l’accès à la combinaison des mots. Elle propose donc d’intégrer l’étude de leur développement dans une analyse pragmatique de la communication, prenant en compte leurs différentes formes et fonctions, comme pour les actes de langage. Selon Tourrette (1999), l’attention conjointe, la désignation gestuelle, les gestes symboliques sont actuellement plutôt considérés comme des précurseurs de la théorie de l’esprit, qui est indispensable à la communication non verbale puis verbale.

Une recherche à l’école maternelle

Dannequin (1989) rapporte une recherche conduite auprès d’enfants de trois écoles maternelles de la région parisienne, âgés de 5-6 ans (grande section de maternelle), observés en interaction en petit groupe (6 à 9 participants) ; leur tâche est d’élaborer, en commun, un projet d’animation. L’objet de la recherche est d’observer les moyens verbaux et non verbaux employés par les enfants pour réguler et gérer les tours de parole dans le groupe. L’une des premières observations a trait aux changements continuels de postures des interactants. Dannequin note que les combinaisons – changements posturaux, gestes et production d’énoncés – peuvent être successives ou simultanées. La combinaison la plus fréquente semble être un changement postural, qui précède un geste, suivi d’une
prise de parole. L’attitude corporelle ou le geste semble avoir pour rôle de préparer les autres participants à l’énoncé qui suit. Elle constate également que le répertoire gestuel et postural utilisé par les enfants est partagé par tous.

Le processus de socialisation (et où on (re)parle de Vygotsky, Bruner, Snow, Ely & Gleason

Le processus de socialisation, c’est-à-dire d’adaptation d’un enfant au milieu socioculturel dans lequel il est élevé, est universel, mais son contenu varie largement selon les cultures : chaque société, chaque groupe socialdéveloppe une conception de l’éducation qui reflète ses propres valeurs culturelles. L’un des instruments de lasocialisation est le langage, comme l’a développé Vygotsky (1985), et c’est en ce sens qu’on peut parler desocialisation langagière à travers la communication et le langage (Bruner, 1983 ; Snow, 1986). L’apprentissage de la communication correspond aussi à cette adaptation de l’enfant à son milieu, à travers plusieurs aspects (Ely & Gleason, 1995) :
– Une part importante de la socialisation est effectuée explicitement par le langage que les adultes
adressent aux enfants pour leur expliquer le monde, leur donner des directives, leur raconter des histoires.
– Les enfants doivent également apprendre les conditions d’usage du langage lui-même : savoir ce qu’il
faut dire, quand, comment et à qui le dire, pour reprendre la terminologie de la pragmatique du langage.
– Les enfants participent à des interactions verbales marquées, souvent de manière subtile, quant aux rôles, aux statuts et d’autres aspects de la structure sociale. C’est le cas par exemple du marquage du genre à travers lescontextes de communication parents-enfants choisis pour les garçons et les filles, les premiers étant davantage sollicités dans des contextes de jeu et les secondes dans des situations d’aide) ou à travers la fréquence des interruptions, plus élevée avec les filles qu’avec les garçons (Gleason & al., 1994 ; Greif, 1980 ; Wells, 1985).

Quand on observe des contradictions entre les objectifs et les pratiques institutionnelles

Dans le passage CM2/ 6ème, Manesse (1987) montre que, si on parle beaucoup en classe de français – on parle plus qu’on écrit -, les échanges rapides ne permettent pas aux élèves de développer des prises de parole autonomes et complexes. On rejoint là une contradiction entre les objectifs déclarés des enseignants et les pratiques réelles de classe, telle que De Pietro & Wirthner (1998) ont pu la mettre en évidence dans une étude conduite avec des enseignants suisses.

Des compétences très hétérogènes – et quand les différences s’accroissent en défaveur de ceux qui sont déjà défavorisés
Comme le souligne Florin (1991), les compétences des enfants dans cette tâche complexe sont très
hétérogènes, et les variations interindividuelles de prise de parole effectives ne font que renforcer cette hétérogénéité.
Prendre la parole et recevoir une réponse de l’enseignant est d’abord la manifestation d’une certaine compétence à communiquer ; c’est aussi la manifestation d’une capacité à s’affirmer socialement dans des situations particulières ; c’est enfin la condition même de l’exercice de compétences communicatives, sociales et linguistiques. A contrario, les enfants qui ne parviennent pas à se faire entendre, qui se trouvent en marge du processus communicatif, sont défavorisés pour progresser dans la maîtrise de la langue.

Petits parleurs et grands parleurs: stabilité dans le temps (à l’école maternelle) – prédicteurs de l’adaptation ou de la réussite scolaire

Dans un suivi longitudinal de 200 enfants d’école maternelle et élémentaire (cycles 1 et 2) sur une durée de quatre ans, Florin (1991) montre que les comportements de participation aux conversations scolaires sont stables : statistiquement, les petits parleurs ou les non-parleurs tendent à le rester ; de même pour les grands parleurs. En outre, la participation aux conversations scolaires constitue le prédicteur ou l’un des prédicteurs en maternelle de l’adaptation ou de la réussite scolaire dans les premières années d’école élémentaire. Florin (Florin & al., 1985 ; Florin, 1991) relève que les grands parleurs sont ceux auxquels les enseignants s’adressent le plus, à la fois pour les solliciter et leur répondre, ce qui contribue à encourager leur participation aux échanges de la classe.

Arrêtons là, cette micro revue

La place d’un Learning Coach dans des activités d’apprentissage de la communication

Une histoire personnelle pour commencer: quand j’étais Assistant de langue dans un lycée anglais, je m’échappais deux matinées par semaine pour agir dans une école primaire. L’une de mes activités était d’écouter lire des enfants en difficulté avec la matière lecture, l’autre activité principale était de leur faire un « cours » de gym reposant sur des jeux..

Communiquer, c’est vouloir être entendu. Par sa manière d’écouter/d’entendre le maître ou le professeur, va communiquer ses attentes implicites / explicites de manière différenciée selon l’enfant auquel il s’adresse. Et, ce faisant, il n’est pas toujours conscient de ce qu’il fabrique.

Le learning Coach pourrait être là, NON pas comme un inspecteur pour juger / évaluer la conformité des activités d’enseignement, mais pour observer les effets et proposer aux enfants des occasions de s’exprimer (sous le contrôle pédagogique de l’enseignant dans la classe).

Une analyse documentaire des mécanismes imaginés par les autorités compétentes pour lutter contre les difficultés scolaires montre que les interventions dans la classe, l’aide apportée en classe sont les plus efficaces.

Une écoute bienveillante et exigeante, des activités de communication « authentique », de la philosophie avec les enfants (comme Monsieur Fédéric Lenoir la pratique (2) (3)), du coaching « prise de parole » en public, aussi pour les enseignants seraient des situations dans lesquelles un Learning Coach pourrait être utile.

Irréaliste?

Ne jugeons pas la proposition avant de l’avoir testée.

Références

(1) Agnès Florin, Daniel Véronique, Jean-Pierre Courtial, Yann Goupil. Apprentissage de la communication en milieu scolaire

(2) Frédéric Lenoir – une vidéo de présentation sur YouTube

(3) Site officiel de Frédéric Lenoir

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