Théories et pratiques de l’apprentissage situé 6/101

Lucy Suchman, mon téléphone portable et moi

Introduction

Je termine à l’instant la lecture du livre de Lucy Suchman [1]déjà évoqué dans mon précédent billet qui traitait de l’art des conversations qui comptent.

Lire Lucy Suchman, n’est pas une partie de pique-nique, mais la lecture vaut l’effort pour qui se dit spécialiste de l’apprentissage, et tout particulièrement du digital learning. En effet le Digital learning, le plus souvent propose des situations d’interaction entre l’apprenant et une/des ressources formatives, parfois interactives dans des contextes de collaboration (ou non) avec une communauté dans un espace virtuel. C’est en quoi l’ouvrage de Lucy Suchman était dans ma liste de référence. Ce billet n’épuisera pas ce que cette première lecture m’a apporté.

La thèse de Suchman (très simplifiée)

Sa thèse, reprise de ses mots, tient en une phrase. elle porte sur l’asymétrie qui existe dans la relation entre la machine et l’homme qui l’utilise: 

Alors que les activités d’un utilisateur sont multiples au cours de la réalisation d’une tâche, « la machine n’a accès qu’aux actions (activités) qui changent son état. » Il y a donc asymétrie entre ce que l’usager (user) fait et  ce que la machine peut effectivement prendre en compte, ce qui peut être à l’origine de nombreuses difficultés: impasses ou cercles vicieux (boucles).

Un très long chapitre du livre est d’ailleurs consacré au détail d’une expérimentation sur l’usage d’un photocopieur Xerox muni d’un système d’aide intelligent. Et si la lecture peut nous paraître longue et fastidieuse, là est posé très clairement le défi auquel sont confrontés les designers d’interfaces homme-machine.

Mon portable et moi

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Comme beaucoup d’entre nous, j’utilise un téléphone portable. Dans les faits, j’en ai deux. Le premier, d’un modèle très ancien, que j’utilise pour téléphoner, et, le second, plus récent, que j’utilise pour le reste, plus précisément pour le reste des usages que j’en fais.

Je ne rentrerai pas dans le détail ici, mais je vais m’intéresser au paramétrage récent que j’en ai fait. Pour faire court, je lui ai indiqué que j’avais trois langues de travail (et non pas une seule, en l’occurrence la langue allemande qui était le paramétrage initial) et que j’activais la fonctionnalité d’assistance à la rédaction de sms.

L’écriture de sms n’es pas mon mode privilégié de communication, et, réduire le temps passé à les écrire me semblait un objectif que je pouvais poursuivre. Par ailleurs, linguiste de formation, j’étais curieux de découvrir la forme que prendrait l’assistance. L’assistant intelligent, garde en mémoire vos sms précédents et vous propose au fil de l’eau, dans mon cas dans les trois langues de travail, les mots qui complètent la phrase en cours en prenant compte le contexte.

De même que ce sont les algorithmes de LinkedIn, Facebook ou Google qui déterminent, ce qu’on l’on vous donne à voir, cet assistant intelligent, me redonne, en permanence, ce que j’ai écrit précédemment et me cantonne dans un registre limité à quelques centaines de mots, nécessaires et suffisants pour traiter tout ce que je traite par sms.

Mais, qu’en serait-il de mes propres facultés de pensée, si toute ma communication se faisait par sms ou tweet?

Références

[1] Suchman, L. (2007). Human machine reconfigurations. Plans and situated actions. (2e édition)

Billet 1Définitions de l’apprentissage situé

Billet 2Pourquoi s’intéresser à la théorie de l’apprentissage situé?

Billet 3:  Démarche et retour aux sources

Billet 4: Mai 1968 et l’apprentissage situé

Billet 5 : Apprentissage situé et conversation

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