Théories et Pratiques de l’apprentissage situé 51/101

Conversations avec moi-même n°8/n

Introduction

La dernière conversation avec moi-même remonte au 21 août 2018. C’est bien loin et cela serait un peu triste si je n’avais rien appris de nouveau, et cette fois encore, j’ai beaucoup appris, et non seulement au sujet de l’apprentissage situé.
C’est aujourd’hui le 51e article sur les 101 que j’ai prévu d’écrire, un bon moment pour faire un point sur le chemin parcouru et le chemin à venir sur ce sujet là.
Je concluais l’article du mois d’août sur trois choses que j’envisageait de faire différemment. Elles restent plus que jamais d’actualité et ont prouvé leur efficacité au cours des derniers mois:

  • focus on things that really matter to me,
  • keep going,
  • stop complaining.

Christian, qu’as-tu appris sur l’apprentissage situé?

Avant d’entamer cette série d’articles intitulée « Théories et pratiques de l’apprentissage situé » j’avais rendu compte d’un livre collaboratif intitulé « Communauté de pratique et management de la formation, sous la direction d’Eddie Soulier et Jacque Audran paru aux presses de l’UTBM en 2017, et notamment présenté la contribution d’Eddie Soulier intitulée La pratique : un phénomène, une perspective ou une ontologie ? Quelques clés de lecture pour identifier, délimiter et caractériser une pratique.  Contribution à laquelle je vous renvoie, car c’est cette contribution qui a déclenché mon envie d’approfondir la notion de pratique. Et je constate qu’il me reste(rait) de nombreux axes à explorer.

De ma 4ème lecture je retenais ceci.
L’article ouvre des perspectives par la multiplicité des clés d’entrée qu’il propose. Ce que je retiens de particulièrement percutant, pour moi, c’est l’extrait suivant, dont je comprends aujourd’hui beaucoup mieux le sens:
« selon Lave, les structures ou les formes symboliques qui façonnent et sont façonnées par l’action des agents ne sont localisées ni dans le mental ni dans l’interaction, mais sont « des relations entre des personnes engagées dans une activité dans et avec un monde socialement et culturellement structuré. Ce monde est lui-même socialement constitué » (Lave, 1991, p. 148). Autrement dit, une activité serait située sur la base d’une double relation enchevêtrée : l’acteur agissant et l’activité dans laquelle il est engagé d’une part, et cette même activité et le monde social par lequel elle est organisée, d’autre part.
Parallèlement aux relectures de Cognition in Practice, j’ai entrepris la lecture ou relecture selon le cas d’ouvrages de Pierre Bourdieu, et de fait j’ai aussi mieux compris où les théories de Bourdieu et Lave divergent. Les concepts bourdieusiens de champ et d’habitus me sont plus familiers. Et il me semble, mais cela mériterait d’être argumenté, que Jean Lave et Pierre Bourdieu ne regardent pas une situation donnée avec la même focale. Chez Lave nous avons ces concepts de « Arena » Cadre/contexte « Settings » et personne-agissante (person-acting).
Dans sa contribution déjà cité, évoquant les 4 niveaux de segmentation qu’il envisage Eddie Soulier nous dit, pour le niveau 2:
« Bourdieu élabore bien une théorie de la société, mais sur un mode désagrégé, autour d’une unité d’analyse formée par les « champs sociaux » conçus comme des microcosmes. […] Un niveau « deux bis » serait alors envisageable, celui auquel se situe typiquement Lave, qui rejette clairement le mécanisme de l’habitus, c’est-àd ire l’hypothèse d’une socialisation incorporée. Lave conserve une théorie consistante de la structure sociale, mais l’aborde sous l’angle d’une théorie de l’activité située dans un contexte social, ce qui lui permet d’accorder une place, et donc une certaine autonomie à l’action et à l’expérience des personnes engagées dans ces activités, contrairement à Bourdieu. »

Jean Lave, de son côté, distingue les concepts « d’arena » et de « settings », L’arena (arène)  étant l’espace physique, concret, objectif, déterminé par des règles d’agencement sur lesquelles l’usager n’a pas d’influence, est opposé au concept de settings qui lui est personnel à chaque usager.

Les concepts de bourdieusiens de champ et d’habitus me semblent être d’un niveau plus général de compréhension, interprétation d’une situation donnée.

Christian, qu’as-tu appris sur toi-même?

Tu l’auras compris, je me prends comme objet d’observation, et j’essaie de voir ce qui dans la théorie de l’apprentissage situé peut m’aider à observer et interpréter mes propres comportements. Au cours de ces derniers mois, j’ai investi du temps dans deux domaines:
1. l’animation d’un cercle WOL interculturel – qui a fait l’objet de 12 articles sur LinkedIn – le dernier article de la série « # WOL – Dairy of a New Intercultural Circle 12/n »

2. l’animation de plusieurs ateliers avec les Learning Battle Cards et l’écriture de 29 articles, toujours sur LinkedIn. Le dernier article: « Ce que j’ai appris en écrivant 28 articles sur les Learning Battle Cards (TM) »

Ces deux projets, parmi d’autres, m’ont mis dans des situations de pression dans ma relation au temps, et de nombreux déplacements sur des territoires non connus, m’ont appris une chose nouvelle:

ma relation au temps. Tout en ayant conservé voire développé mes bonnes pratiques de gestion du temps, j’ai appris à vivre chaque jour pour lui-même, c’est à dire à affronter les difficultés que ce jour présente au moment où elles se présentent , même si elles ont été anticipées (et elles auront été anticipées pour en réduire l’impact).

 

Billets précédents

Billet 1Définitions de l’apprentissage situé

Billet 2Pourquoi s’intéresser à la théorie de l’apprentissage situé?

Billet 3:  Démarche et retour aux sources

Billet 4: Mai 1968 et l’apprentissage situé

Billet 5:  Apprentissage situé et conversation

Billet 6: Lucy Suchman, mon téléphone portable et moi

Billet 7: Conversations avec moi-même (n° 1)

Billet 8: L’apprentissage situé mis en pratique, cela ferait quoi?

Billet 9: Contribution de la psychologie soviétique à la théorie de l’apprentissage situé

Billet 10Les apports de la philosophie à la théorie de l’apprentissage situé

Billet 11Focus sur l’école Dewey

Billet 12Apports de la psychologie de la perception – la notion d’affordance

Billet 13: Apprentissage situé et intelligence artificielle, deep learning, réalité virtuelle, réalité augmentée, etc…

Billet 14: Conversations avec moi-même (N°2)

Billet 15: Quand John Dewey rencontre Jean Lave

Billet 16: Cognition in Practice (1/n)

Billet 17: Cognition in Practice (2/n)

Billet 18: Cognition in Practice (3/n)

Billet 19: Cognition in Practice (4/n)

Billet 20 Cognition in Practice (5/n)

Billet 21: « Conversations avec moi même N°3 »

Billet 22: Cognition in Practice (6/n)

Billet 23: Cognition in Practice (7/n)

Billet 24: Cognition in Practice (8/n)

Billet 25: Cognition in Practice (9/n)

Billet 26: Cognition in Practice (10/n)

Billet 27: Cognition in Practice (11/n)

Billet 28: « Conversations avec moi-même N°4 »

Billet 29: Cognition in Practice (12/n)

Billet 30: Cognition in Practice (13/n)

Billet 31: Cognition in Practice (14/n)

Billet 32: Cognition in Practice (15/n)

Billet 33: Cognition in Practice (16/n)

Billet 34: Cognition in Practice (17/n)

Billet 35: « Conversations avec moi-même N°5 »

Billet 36: Cognition in Practice (18/n)

Billet 37: Cognition in Practice (19/n)

Billet 38: Cognition in Practice (20/n)

Billet 39: Cognition in Practice (21/n)

Billet 40: Cognition in Practice (22/n)

Billet 41: Cognition in Practice (23/n)

Billet 42: « Conversations avec moi-même N°6 »

Billet 43: Cognition in Practice (24/n)

Billet 44: Cognition in Practice (25/n)

Billet 45: Cognition in Practice (26/n)

Billet 46: « Conversations avec moi-même N° 7

Billet 47: Cognition in Practice (27/n)

Billet 48: Cognition in Practice (28/n)

Billet 49: Cognition in Practice (29/n)

Billet 50: Cognition in Practice (30/n)

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